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Qu'il fait bon dans mon moulin
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19 janvier 2015

Mon ami Abd El Majid n'est plus, Allah yerhamou !

couloir-de-l-ecole

 

HISTOIRE VRAIE

Je remercie mon ami Camus Bouhnik de m’avoir adressé cette histoire touchante, chaleureuse et pleine de générosité… Une histoire réelle vécue dans l’intimité et la ferveur de l’amitié. Une  histoire qui est une tranche de vie, rare et presqu’impossible à imiter  dans les valeurs perturbées et effritées de cette année 2015.

Un souffle de bonté, tel parfum de jasmin, dans l’horreur de l’horrible attentat contre Charlie Hebdo et le super marché « Hyper Casher ». Mais pourquoi tuer des innocents artistes ou clients quand on peut se comprendre, s’aimer, s’entraider, même dans ce que l’on a appelé « la Différence intraitable » ? Et pourquoi ne pas considérer les trois religions du Livre comme des facteurs/relais d’union et de compréhension au lieu de division, mésentente, exclusion… ? Pourquoi transformer l’amour en haine ? Pourquoi ne pas considérer les différences comme des correspondances plus ou moins visibles, d’ailleurs et plutôt comme des similarités en notre Humanité ?

Ce vécu de Camus et de Majid dans notre ville natale, Sfax, Tunisie est une véritable leçon d’humilité, d’amitié et de modestie. Merci encore, mon cher Camus, de nous l’avoir relatée et dans les tristes conditions du décès de ton ami d’enfance.

ArchG-12wHédi Bouraoui, York University,Toronto, Canada

 

Mon ami Abd El Majid, Allah yerhamou !

Abd El Majid Gharbi, mon ami du cours élémentaire 2ème année - et de plusieurs autres classes encore, le souvenir se fait flou au fil des ans -, mon compagnon de banc, car nous avons partagé le même pupitre tout le long de l'an.  Ainsi l'a voulu notre institutrice Mme Peretti : nous étions assis par ordre de classement mensuel. Gharbi et moi étions 1er et 2ème tout le long des mois avec un changement de rang mutuel de temps en en temps, avec une différence d'un demi-point au total.

Majid était modeste. Un jour que l'inspecteur primaire est venu contrôler la classe, posant des questions aux élèves au gré du hasard, il a demandé chaque fois le classement de l'écolier interrogé. On lui répondait alors selon l'ordre, 10ème, 15ème, 12ème, 18ème, 9ème etc. L'inspecteur très satisfait des réponses s'est exclamé :

- Le élèves ont tous donné des bonnes réponses : même le 15ème et le 18ème sont si callés, alors que dois-je attendre du 1er de la classe ? Au fait qui est le premier ?

Comme la maîtresse ne répondait pas, j'ai pris la parole :

- C'est Abd El Majid Gharbi Monsieur l'inspecteur.

- Non Monsieur l'inspecteur, c'est Camus intervient mon modeste ami Majid.

- Alors mettez-vous d'accord, c'est l'un ou l'autre ? demande l'inspecteur amusé en regardant notre institutrice.

- C'est l'un et l'autre répond Mme Peretti. Ils se disputent la 1ère place, c'est difficile de les départager.

- Bon, je vous pose des questions : en quelle année débute la révolution française ?

- 1789 Monsieur répond Majid (réponse à une question dont la leçon sera traitée au cours moyen).

- Combien de marches escalade-t-on afin de monter à la Tour Effel ?

- 1789 Monsieur réplique-je. 

- Que s’est-il passé en l'an 800 ?… commence notre examinateur…

- Charlemagne est sacré empereur à Rome le 25 décembre riposte Majid.

- Apparition de la version arabe des Mille et Une Nuit je réponds.

Bon je vous déclare premiers ex-æquo, décide l'interrogateur et il nous offre deux images.

Je vous ai raconté que chez Mme Peretti on s'asseyait par ordre de classement; c'était vrai,  sauf au premier mois avant la première composition.  Je m'étais installé alors à la tête de la deuxième rangée près de Lacomare. Le mois d'après j'étais installé près de Majid selon le classement.

L'instit m'avait appelé un jour, au tableau afin de réciter une leçon. Après moi a été interpelé Lacomare. Alors j'ai pensé que Mme Peretti allait inviter les élèves à venir au tableau selon le même ordre que nous étions assis le mois précédent. Ayant bonne mémoire, comme aujourd'hui, j'ai chuchoté : « Chelly, à toi, elle va t'appeler ».

Et Mme Peretti appela André Chelly.

Majid a vite compris, nous avions la même tête :

- Mme. Peretti appelle les élèves au tableau selon l’ordre la 2ème rangée du mois dernier…   

Majid et moi amusés par ce nouveau jeu consistant à deviner, qui seront les élèves interpelés, les nommions à tour de rôle à la surprise de nos camarades. Ensuite, nous avons nommé Granonne et la maîtresse invita Jean-Pierre Granonne… Ainsi de suite, passèrent   René Ankri, Clément Seror, Christian Lazzarini, Jacques Ankri, Mohamed Bouraoui et d’autres…  

Je me souviens au cours d’une année en 194… a été annoncée la fin du monde présumée pour un vendredi automnal à 17 heures 30. En fin de journée l’institutrice marqua sur le tableau noir la liste des devoirs et leçons à préparer et à apprendre pour le lendemain.   Nous étions priés de recopier les prescriptions sur notre cahier de textes. Je me suis tourné vers mon ami Majid :

-   C’est la fin du monde, c’est bizarre qu’on nous donne des obligations à faire…

-   Mme Peretti ne sait sans doute pas que le monde est sur le point de finir…

-  Moi je n’inscris rien dans mon cahier… Puisque c’est la fin… dis-je à Majid.

-  Inscris quand-même, on ne sait jamais, si des fois il y a contre-ordre… répondit mon sage ami.

J’ai inscris tout de même les prescriptions de Mme. Peretti, suivant les conseils de mon sage ami. Bien m’en prit, heureusement pour nous tous, il y a eu abrogation ce vendredi 194… à 17 heures 30.

Le samedi 6 décembre 2014, Majid m’a envoyé un message oubliant sa maladie, pour me souhaiter un heureux anniversaire. « J’ai du rater la date, mais mieux vaut tard que jamais, bon et joyeux anniversaire, Camus ». Mon cher Majid, tes vœux sont arrivés juste à temps, tu t’es souvenu de la date exacte, malgré le nombre des années et le mal qui te tenaillait. Merci de tout cœur. Tu m’as ému.    

Repose en paix ami d’enfance Abd El Majid Gharbi, je te regrette et avec moi bien d’autres camarades. Je ne t’oublierai jamais.

Allah yerhamou, qu’il repose en paix, cet homme sage et aimé de tous… Mes sincères condoléances vont à la famille, aux enfants, petits-enfants…  Baraka fikoum ! 

Camus Bouhnik  Sfax-Beer Sheva

 

 

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Commentaires
I
Tu as complètement raison cher ami Le Cid de déplorer la perte de notre grand ami Majid.Majid, que son âme repose en paix était la simplicité même, la noblesse de cœur personnifiée. et tu le dis : il était plein de gentillesse et de serviabilité. Merci Le Cid.
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L
Mon ami Majid je ne t'oublierai jamais.Tu es mon enfance....Tu es Moulinville ...Tu es SFAX mon pays natal.....Tu es l'école de Moulinville;;;;Tu resteras à jamais mon meilleur camarade scolaire ...Ta gentillesse , ta serviabilité sont et resteront légendaires. Adieu mon ami .
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